Personne sautant de joie

Marche, santé mentale positive et dépression.

« Si tu n’arrives pas à penser, marche ; si tu penses trop, marche ; si tu penses mal, marche encore. » (Jean Giono)

Marcher : on en connaît bien les avantages pour le bien être physique et dans prévention et le traitement de nombreuses maladies chroniques, mais son impact sur la santé mentale est beaucoup moins connu. Et pourtant,  on ne compte plus  le nombre d’ écrivains et de philosophes qui ont témoigné des bénéfices que leur procurait cet exercice. Et nous mêmes, n’ avons nous pas tous plus ou moins expérimenté combien marcher, ne serait ce que quelque minutes, pouvait nous aider à résoudre un problème, à calmer une émotion, à améliorer notre humeur…

Au delà de ces constats, des recherches, de plus en plus nombreuses depuis une vingtaine d’années, viennent  solidement conforter le rôle de l’activité physique en général et de la marche en particulier sur nos capacités et notre bien être mental. Mieux, ces études démontrent son efficacité non seulement dans la prévention mais aussi dans le traitement de troubles psychiques fréquents tels que  la maladie d’Alzheimer, l’anxiété, et la dépression qui fera l’objet de cet article.

 

Santé mentale : de quoi parle t’on ?

Selon l’OMS, la santé mentale est un « état de bien-être qui permet à chacun de réaliser son potentiel, de faire face aux difficultés normales de la vie, de travailler avec succès et de manière productive, et d’être en mesure d’apporter une contribution à la communauté »[1].

On peut distinguer :

  • La santé mentale positive : bien-être, épanouissement personnel, ressources psychologiques et capacités d’agir.
  • La détresse psychologique réactionnelle induite par les situations éprouvantes et difficultés existentielles (deuil, échec relationnel, scolaire, harcèlement…). Elle  n’est pas forcément révélatrice d’un trouble mental, mais peut entraîner des troubles graves .
  • Les troubles psychiatriques de durée variable, plus ou moins sévères, qui relèvent d’une prise en charge médicale et peuvent avoir des conséquences très graves (handicaps, décès prématurés, discrimination et exclusion…)

On notera qu’on peut être atteint de troubles psychiatriques et cependant être en bonne santé mentale , c’est à dire s’épanouir et se sentir bien grâce à des soins adaptés, exactement de la même manière qu’on peut être physiquement en bonne santé avec un diabète ou une hypertension correctement traités. [2]

Marcher pour une bonne santé mentale [3]:

Comme d’autres activités physiques, la marche est un facteur de développement et de protection de la santé mentale.

Elle stimule  la capacité à résoudre les problèmes, la créativité ou la mémorisation. Nos meilleures idées nous viennent en marchant, ce constat a pu être confirmé par des recherches qui ont montré qu’une personne en marche produisait deux fois plus de réponses créatives qu’une personne assise.

Elle  est associée à un sentiment de plaisir, de calme, de relaxation. Elle améliore la qualité du sommeil. Elle réduit l’anxiété, ce sentiment de peur dont on a tous pu faire l’expérience dans certaines situations (un examen,  un rendez-vous chez le dentiste…) mais qui peut envahir notre cerveau sans cause particulière et devenir paralysant.

Elle renforce l’ estime de soi du fait de l’effort accompli et elle favorise la socialisation.

 

Marcher pour guérir de la dépression [4]:

« Bien des dépressions ou des amertumes se dissolvent sur les routes. Marcher c’est retrouver son chemin (David Breton )

On sait maintenant que l’activité physique en général et la marche en particulier  peuvent être bénéfiques dans la prévention et la prise en charge de troubles mentaux tels que l’anxiété ou la maladie d’Alzheimer, mais c’est la reconnaissance  de son efficacité dans le traitement de la dépression, le plus fréquent des troubles mentaux, qui a le plus progressé.

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé,  la dépression est un trouble de l’humeur persistant dans le temps (plus de 2 semaines), qui s’exprime par une tristesse et/ou une perte d’intérêt et de plaisir, souvent associées à d’autres symptômes. Elle est parfois induite par les situations éprouvantes et  des difficultés existentielles (deuil, échec relationnel, licenciement…). Selon le nombre et la gravité des symptômes associés et leur répercussion sur la qualité de vie, un épisode dépressif est qualifié de léger, modéré ou grave.

 

Les preuves des vertus antidépressives de l’activité physique en général et de la marche en particulier s’accumulent depuis une vingtaine d’années : 

  • En 2013, une équipe de la Cochrane Collaboration (Organisation internationale à but non lucratif qui réalise des revues systématiques des effets des interventions de soins de santé a publié l’analyse de 37 études (2 326 participants). Selon les auteurs, l’activité physique dans ces essais était « modérément plus efficace que l’absence de thérapie » sur les symptômes de la dépression. Mais la qualité des essais n’était pas optimale.
  • En 2014 une nouvelle analyse de 39 études (2 008 patients) mettait cette fois en évidence « un effet important de l’activité physique sur les symptômes dépressifs ».
  • En 2022, l’analyse de 21 essais (2 551 patients avec une dépression non sévère) a comparé les effets des antidépresseurs à ceux de l’activité physique et à ceux de l’association antidépresseurs + activité physique. Les bénéfices de ces trois traitements était supérieurs à l’absence de traitement, mais, plus inattendu, « les effets de l’activité  physique seule étaient similaires à ceux des antidépresseurs seuls et même à ceux de l’association antidépresseurs + activité physique ».
  • Plus récemment, en mars 2024, une nouvelle analyse sur les effets de l’activité physique sur la dépression intégrant pas moins de 218 études (14 170 participants) a été publiée. Elle montrait que les effets de l’activité physique sur la dépression étaient « proportionnels à l’intensité prescrite et similaires quelles que soient les comorbidités ou la sévérité initiale de la dépression ». Dans l’ordre d’importance des effets positifs on trouvait la marche ou le jogging, le yoga, la musculation, la gymnastique aérobique, et le tai-chi ou le  tai-chi ou le qi gong.  A noter que c’est la danse qui avait l’effet positif le plus important mais sur un nombre de patients (107) trop petit pour en tirer des conclusions générales.

 

Ces résultats renforcent les recommandations de la Haute Autorité de Santé [5] concernant la prescription d’activité physique en cas d’épisode dépressif:

« Chez un patient atteint d’un épisode dépressif caractérisé, l’activité physique réduit les symptômes dépressifs et améliore la qualité de vie et la sexualité. Après rémission, la poursuite d’une activité physique régulière réduit le risque de récidive durant la première année et après un programme d’activité physique peut être proposé seul et en première intention pour les épisodes dépressifs d’intensité légère à modérée, et en association avec un traitement médicamenteux et/ou une psychothérapie pour les épisodes d’intensité modérée à sévère. L’activité physique doit être poursuivie sur le long cours pour éviter les risques de rechutes et de récidives. Les activités physiques de type marche, yoga, qi gong, etc. ont des bénéfices rapportés dans le traitement de l’anxiété et de la dépression. […] La marche présente peu de contre-indications et est facilement accessible, même si les modalités de son efficacité (fréquence, intensité, durée et type) restent à préciser ». Selon le Dr Eric Griez, auteur de « La marche thérapie » [6]les personnes souffrant de dépression commencent à marcher 3000 pas par jour, pour atteindre 7000 à 7500 pas. Comme pour les antidépresseurs, cet exercice ne donne des résultats qu’à partir de plusieurs semaines et il doit durer au moins trois mois. Il recommande de poursuivre ensuite cette routine pour éviter les rechutes.

Références de l’article

[1] https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/sante-mentale

[2]  https://smho-smso.ca/eleves/comprendre-la-sante-mentale/

[3] https://www.direct-assurance.fr/assurance-sante/bienfaits-marche-sante-mentale

[4] https://www.vidal.fr/actualites/30765-activite-physique-et-depression-eh-bien-dansez-maintenant.html

[5] https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2022-08/synthese_aps_depression_vf.pdf

[6] https://www.topsante.com/medecine/sante-mentale/anxiete/bienfaits-marche-a-pied-stress-anxiete-651466#item=1